Loi Asile Immigration : une nouvelle page dans la mobilisation
Quel est le quotidien des étrangers qui attendent une régularisation ? De ceux qui sont intégrés en France depuis des années et perdent leur titre de séjour et leur travail à cause de problèmes en préfecture ? Quels obstacles administratifs doivent-ils surmonter ? Derrière chaque demande, il y a une personne réelle, une histoire, un parcours. Le Secours Catholique – Caritas France, très engagé sur les questions migratoires, a proposé à des députés et sénateurs du département des Hauts-de-Seine de venir rencontrer des personnes migrantes et des bénévoles qui les accompagnent dans leurs démarches. Les parlementaires étaient invités à parcourir une « bibliothèque vivante » au cœur de l’Assemblée nationale. Une expérience singulière, loin des micros et des caméras.
Des « livres qui parlent » : c’est à partir de cette idée que les équipes de la délégation des Hauts-de-Seine ont imaginé l’événement qui s’est déroulé le 2 février au cœur de l’Assemblée nationale. Un lieu hautement symbolique où sera bientôt présentée la loi Asile Immigration. Tout au long de la matinée, des parlementaires et leurs collaborateurs ont écouté les témoignages de personnes étrangères et de bénévoles qui les soutiennent. Accueillis par Henriette et Bénédicte, respectivement présidente et déléguée des Hauts-de-Seine, les parlementaires ont ainsi passé un moment avec les personnes directement concernées, pour comprendre ce qu’elles vivent.
Dès 9h, un premier binôme constitué d’une députée et de sa collaboratrice a pris place dans cette « bibliothèque vivante » et écouté Wafaa. L’absence de choix, la contrainte de l’exil, l’envie d’offrir un bel avenir à son enfant : de sa petite voix, cette mère de famille a raconté avec émotion son histoire, qu’elle avait choisi d’intituler « L’avenir de mon fils ».
Dans une ambiance tamisée, les parlementaires ont tour à tour « feuilleté » chacun de ces livres singuliers, des pages douloureuses mais aussi pleines d’espoir : le récit de Zanek (« J’en ai vu passer des présidents, j’attends encore »), épaulé par son ami Amar (« Comment tu fais pour vivre, sourire, continuer ? ») ou celui de Caline (« La France, terre d’accueil ? »). 23 témoins ont courageusement rendu concrète l’expérience de l’exil, la persévérance et la dignité.
À leurs côtés, des bénévoles du Secours Catholique ont également apporté leur témoignage. La dématérialisation des demandes, la complexité d’accès à une régularisation : Chantal, Marie-Thérèse ou Karin ont raconté les obstacles administratifs, la procédure « de plus en plus difficile, qui s’aggrave ». Quant à Thierry et Johanna, ils ont fait la lumière sur l’accompagnement des jeunes et porté auprès des parlementaires le « constat de défaillance de la protection de l’enfance » ainsi que l’importance du rôle de l’entreprise dans l’intégration. Ils accompagnaient Moussa, 21 ans, arrivé seul en France à l’âge de 15 ans. À l’écoute de son récit, l’une des élus n’a pas caché son émotion : « C’est un très beau témoignage. Nous constatons qu’il manque des gens formés pour écouter les mineurs à leur arrivée. C’est un vrai sujet dans les Hauts-de-Seine ».
Et c’était bien là l’objectif de l’équipe organisatrice de la « bibliothèque vivante » (Judith, Capucine, Marie-Sophie, Pauline et bien d’autres encore) : sensibiliser aux problèmes quotidiens que rencontrent les personnes en situation irrégulière. Confrontés à la réalité de la question migratoire, les parlementaires se sont montrés bienveillants et rassurants. « Nous avons eu des échanges très poignants. Nous avons mis des visages et des histoires sur un projet de loi » a confié l’une des parlementaires à l’issue de sa visite. Ils ont découvert ou confirmé la lenteur des procédures administratives. L’un des participants a d’ailleurs déploré un « problème d’organisation nationale ».
Pour clore cette séance, chacun a pu déposer ses remarques et impressions par écrit, dans une urne. À leur sortie, les parlementaires se sont vu remettre une pochette contenant les positionnements du Secours Catholique ainsi que le livret regroupant les histoires de chacun des témoins. Une députée, membre de la commission des Affaires sociales, a confié à Philippe, vice-président de la délégation de Paris, vouloir « inviter des collègues à partager cette expérience ». Ce moment fort d’humanité et d’entraide au cœur de l’Assemblée a donné de la voix à ceux qu’on n’entend pas.